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Stéréotypes, préjugés et discriminations liés au sexe

mardi 19 juin 2012, par Albertine

Etre femme, mère et engagée dans la société… : est-ce conciliable ? Louise Ngandu y répond en dénonçant les stéréotypes, les préjugés et les discriminations liés au sexe, particulièrement lorsqu’il s’agit de l’engagement des femmes.

Etre femme, mère et engagée dans la société…

La question que beaucoup de gens se posent est : est-ce conciliable ? peut-on à la fois jouer le rôle de mère (maternité, s’occuper des enfants, du ménage) et être engagée à l’extérieur ?
Je réponds que oui.

La parité reste un des défis en RD Congo. Ainsi, l’éducation et la luttre contre toutes les formes des discriminations liées au sexe restent un combat pour les femmes.

Aujourd’hui, dans cette situation de crise généralisée que connaît le pays, tout le monde s’accorde pour reconnaître le rôle économique joué par la femme pour la survie de la famille.

Cette situation inverse de fait les rapports dans le couple, car la femme devient un partenaire qui a un apport non négligeable. Elle passe ainsi de la situation communément admise où elle était prise en charge par le mari qui lui assurait ses besoins et ceux des enfants à celle où elle est actrice de premier plan.

Force est de constater, dans ce cas, que son activité économique au dehors et ses charges familiales à la maison ne sont pas considérées comme dichotomiques.
Cela illustre le fait que la femme peut très bien concilier ces différents rôles.

Cependant, si les faits le démontrent très bien, l’on se heurte encore à nombre de préjugés et d’idées reçues tendant à l’enfermer dans un seul rôle qui lui serait dévolu, à savoir la maternité, l’éducation des enfants, le ménage.-----

Stéréotypes, préjugés et discriminations

Cette vue réductionniste du rôle que peut jouer la femme se traduit par des préjugés véhiculés tant par des hommes que par des femmes qui reproduisent consciemment ou inconsciemment les modèles ou les schémas reçus. Certains arguments remontent à la nuit des temps, et le Congo n’en a certes pas le monopole.
L’histoire de Marie Popelin , première femme belge diplômée docteur en droit en 1888 et fondatrice de la Ligue des femmes belges, l’illustre à merveille.
Lorsque Marie Popelin obtint son diplôme de docteur en droit, elle était âgée de 42 ans et rêvait de devenir avocate mais sa déception fut plus que grande lorsqu’elle se vit refuser l’accès au Barreau de Bruxelles par la Cour d’Appel et la Cour de Cassation, non pour un motif légal mais du fait de son statut de femme. Les arguments de la Cour d’Appel furent : « Attendu que la nature particulière de la femme, la faiblesse relative de sa constitution, la réserve inhérente à son sexe, la protection qui lui est nécessaire, sa mission spéciale dans l’humanité, les exigences et les sujétions de la maternité, l’éducation qu’elle doit à ses enfants, la direction du ménage et du foyer domestique confiée à ses soins, la placent dans des conditions peu conciliables avec les devoirs de la profession d’avocat et ne lui donnent ni les loisirs, ni la force, ni les aptitudes nécessaires aux luttes et aux fatigues du barreau. »

Cette discrimination offensante et révoltante l’amena à créer la Ligue belge du droit de femmes et plus tard, en 1905, le Conseil National des Femmes Belges, qui a fêté cette année ses 100 ans d’existence.
Les arguments du même genre restent d’actualité à travers le monde et en l’occurrence au Congo pour empêcher les femmes d’accéder à certaines fonctions.
Je ne peux que féliciter la persévérance des femmes et principalement des Sénatrices congolaises, qui se sont battues pour que la parité soit consignée dans la Constitution. C’est une étape de franchi mais tout le travail reste à faire.-----

Rôle des associations des femmes

Les associations de femmes ont un rôle important à jouer notamment dans la sensibilisation et doivent bénéficier d’un soutien structurel pour relever quelques défis permettant d’atteindre l’objectif de la parité. Il faut notamment :

1. donner aux filles comme aux garçons une chance égale dans l’éducation et la formation pour en faire les responsables de demain

2. combattre les mentalités qui tendent à figer le potentiel d’une partie de la population en l’enfermant dans des stéréotypes de tous ordres

3. initier et soutenir des politiques qui favorisent l’égalité des chances entre femmes et hommes.

4. mener des campagnes de sensibilisation afin que les filles et les femmes s’impliquent davantage dans le projet global de construction de notre société.

5. lutter contre les mariages précoces et encourager la scolarité des filles.-----

Récommandations aux décideurs politiques

Il s’agit entre autres de :

-  Rendre la scolarité obligatoire et de mener une campagne de sensibilisation auprès des parents. Mettre l’enseignement dans les priorités politiques.

-  Mener une politique de développement efficace qui combat la pauvreté et le chômage

-  Lutter contre les mariages précoces en menant des politiques de discrimination positives pour promouvoir la scolarité des filles

-  Soutenir les ONG locales qui travaillent sur le terrain tant pour la récupération et l’accompagnement des filles tirées des milieux de la prostitution en vue de leur réinsertion dans la société

-  Soutenir et développer les actions qui sont menées sur le terrain en matière de santé et de prévention ainsi que la lutte contre la propagation du VIH Sida

-  Pour les victimes de viol et autres violences ou mutilations, lutter contre l’impunité des auteurs de ces actes afin qu’ils soient poursuivis et jugés

La cause des femmes congolaises qu’elles soient à l’extérieur ou à l’intérieur du pays, c’est notre cause à tous !

Louise Ngandu

Politologue

Fondatrice et Présidente honnoraire de l’Union des Femmes Africaines

(Suite et fin de son article : "Les élections en RDC : un challlenge pour les femmes")

Mise en Forme CEAF&RI