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Investir dans l’égalité des droits et des chances des femmes et des hommes, c’est investir dans le développement.

mardi 13 janvier 2009, par webmaster

Du 15 au 18 décembre 2008, la Commission Femmes et Développement pour ses 15 ans a organisé des séminaires –ateliers. Partenaires associatifs du Sud et du Nord, dont le CEAF&RI ; décideurs de la coopération au développement avaient là une occasion de faire le bilan des progrès et défis en matière d’égalité ; et de partager leurs expériences et parler des chantiers à venir. Le grand événement de cet anniversaire était la journée de Conférence du 16, sous le haut patronage de son Altesse Royale, la Princesse Mathilde de Belgique.

Quel type de développement pour ce millénaire ?

Le développement, enjeu du millénaire, était au cœur des débats, mais de quel développement s’agit-il ?

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vue de la salle

La volonté de la Commission Femmes et Développement était de sensibiliser et faire prendre conscience à un grand public qu’ « investir dans l’égalité des droits et des chances des femmes et des hommes, c’est investir dans le développement ». Et donc montrer que le genre, dimension transversale, doit être intégrer dans tous les programmes de développement ; comme le souligne la loi Belge du 25 mai 1999, relative à la Coopération Internationale qui fait du genre une de ses priorités. Cette loi constitue le cadre légal de référence du travail de la Commission. Il convient de souligner ici la contribution du CEAF&RI et son expertise dans le domaine de genre à la Commission Femmes et Développement.

Quel progrès de « genre » depuis Beijing ?

La Commission avait l’occasion de jauger le travail accompli sur la question des droits des femmes depuis la Conférence de Pékin de 1995. Conférence où plusieurs gouvernements avaient reconnu que « l’égalité des droits, des chances et de l’accès aux ressources, le partage égal des responsabilités familiales et un partenariat harmonieux entre les femmes et les hommes sont essentiels à leur bien-être et à celui de leurs familles ainsi qu’à l’affermissement de la démocratie ».

L’égalité entre les femmes et les hommes est désormais érigée en condition essentielle du développement durable, de la paix et de la démocratie. Et pour la première fois, les Etats s’engageaient à inclure cet enjeu dans tous les domaines de leur action gouvernementale. La Commission a offert différents espaces de conférence et d’ateliers, pour pouvoir débattre des actions qu’elle a menées et du rôle de l’Etat Belge.

Les interventions et les débats en ateliers et lors de la journée de conférence, ont montré et démontré, pour chaque thème choisi, des avancées et succès dans des situations diverses des femmes ; mais aussi les limites.


Le cas du Maroc

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Mme Fouzia ASSOULI - MAROC

Parmi les avancées, celles obtenues par la Ligue Démocratique pour les Droits de la Femme (LDDF) du Maroc. Le rôle des caravanes pour l’égalité dans l’obtention de ces résultats positifs est original, comme l’a montré Mme Fouzia Assouli, Secrétaire Nationale de la Ligue Démocratique pour les Droits de la Femme. L’objectif de ces caravanes était d’amener les femmes à occuper l’espace public. La ligue a orienté sa stratégie de manière générale sur deux axes : un travail de proximité (écoute, alphabétisation, mise en place de centres d’hébergements des femmes victimes de violences…) ; et un travail de plaidoyer et lobbying qui leur a permis de construire des campagnes. Les autres succès de la Ligue : la réforme du code de famille, amorce de l’intégration de l’approche genre dans les politiques et les budgets et l’accès des femmes à des postes de responsabilité. Un grand regret cependant, l’absence du principe d’égalité entre les femmes et les hommes dans la Constitution.

Le cas du Libéria :

La Résolution 1325 du Conseil de Sécurité des Nations unies avec l’exemple du Libéria qui est présenté comme modèle de bonne pratique de l’empowerment par la Ministre d’Etat du Développement et de la Parité Homme/Femme du Libéria, Mme Vabah K. Gayflor.

Le cas de la R. D. Congo

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Pr. Albertine TSHIBILONDI Avec Me Rose Mutombo R. D.C Congo (Présidente de CAFCO)

Mme Rose Mutombo, Présidente de CAFCO (Cadre Permanent de Concertation de la Femme Congolaise (RDC) et Procureur de la République, a montré le rôle des réseaux de femmes et celui du lobbying politique dans la prise en compte du genre dans le développement.


Quelques défis

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Pr. Albertine TSHIBILONDI avec la Ministre de Genre et Développement Libéria, son excellence Mme Vabah K. GAYFLOR

Multiples raisons freine le succès du genre. Nous retiendrons ici celle qui est liée au mode d’intégration du genre dans les plans d’actions. Elle doit en principe être multisectorielle, et non se limiter à un seul secteur. La tendance est aussi de vouloir greffer le genre en cours de projets sans qu’il ait été pensé initialement, ce qui limite les résultats.

L’intégration du genre qui devrait viser la recherche de l’égalité hommes – femmes, se limite parfois à ajouter la catégorie femmes à un programme déjà existant ; ce qu’a regretté le représentant de ONUSIDA auprès de l’Union Européenne, Denis HAVEAUX, à l’atelier « droits et santé reproductive : droits des femmes et VIH ", lorsqu’il partageait son expérience de terrain en Afrique.

La grande question, comment s’assurer que le genre restera dans l’agenda ! Question qui est revenu à l’atelier : "Empowerment of women : a tool for development".

L’empowerment comme stratégie de développement

L’empowerment des femmes présenté par les institutions de développement comme une stratégie-clé de développement, dans la pratique est restrictive. La tendance est de ne considérer que la capacité des femmes de se prendre en charge, individuellement. Or comme le soulignait Mme Naila Kabeer de l’Institute of Development Studies de Sussex, l’empowerment doit permettre des changements sur différents points. Il ne doit donc pas rester au niveau individuel. La question, comment passer du "je" au "nous" ? Autres interrogation : de quel type d’égalité s’agit-il dans l’empowerment, sachant qu’il existe des hiérarchies tant entre les femmes, qu’entre les hommes ? Et au niveau des femmes occupant des postes de responsabilité politique ou autres, et qui parlent au nom des autres : qui sont-elles ? Comment sont-elles arrivées à ces postes ? Autrement dit quel est leur processus de politisation ? Défendent-elles vraiment le genre ? Sont-elles prêtes à le défendre ? L’ensemble de ces questions ont permis les débats et montré les limites de l’empowerment.

La question du genre et de l’empowerment des femmes furent les deux thèmes qui ont précédé la grande journée du 16 décembre. Les limites et les interrogations de ces deux ateliers reviennent régulièrement aux rencontres qui se font autour de ces thèmes, quelque soit le lieu de ceux-ci. L’un des mérites de ces questions est l’implication aujourd’hui des politiques, plus ou moins avancée selon les pays, mais amorcée. L’appui des pouvoir public est nécessaire pour une meilleure prise en compte de la problématique dans les plans actions gouvernementaux. L’implication de la Coopération Belge a été soulignée et appréciée par les mouvements associatifs présents.

Outre l’implication des pouvoirs publics, il est souhaitable que cette cause ne reste pas un combat de femmes. Le genre doit se construire avec le concours des femmes et hommes, or la composition des commissions reste encore très féminine, une très faible participation des hommes. Lorsque dans les rencontres où sont débattues les questions du genre nous aurons un certain nombre d’hommes, ce sera là une grande avancée.

Marie-Clémence Mba Tsogo